Un vieux tacot

Un vieux tacot.

Comme dit Soljenitsyne, je n’ai pas la force, tout petit individu que je suis, de m’opposer à ce totalitarisme mensonger mais je peux faire en sorte que les mensonges ne se servent pas de moi comme point de passage. Alors c’est décidé, tout petit individu que je suis, j’ai décidé de ne plus nourrir mon esprit de cette routine meurtrière, déversée comme un tombereau de fumier sur un sol déjà bien pollué, ces infos aveuglantes, assourdissantes jetées chaque matin comme la fermière chaque jour va nourrir son poulailler. Tout ce sang, tous ces meurtres légiférés, sournoisement travaillés pour être admis comme nécessaires, comme seule réalité. Que l’on jette sur nous comme une lourde cape, un linceul de soumission qui nous fait courber le dos. Je veux nourrir mon esprit, et non plus le gaver de toutes leurs erreurs, de toutes leurs horreurs, mais en faire un simple vase, un vase de lumière, pour d’autres fleurs pour une autre Humanité. Je fais comme la petite fille de ce conte pour enfants, mais enfants voulant vraiment grandir, cette petite fille qui s’est échappée de la cour d’incréation, de ces écoles à l’enseignement bien limité, de cette soumission bien trop pesante faisant pencher sur le sol des têtes trop lourdes, qui ne savent plus se redresser. Elle a réussi, cette petite fille, elle a réussi à traverser la rivière de liquide (quand je dis liquide, je parle de l’argent évidemment), cette rivière impétueuse aux relents putrides de néant. Elle a nagé avec une telle force, un tel courage, une telle audace qu’aussitôt arrivée sur l’autre rive, elle s’est enfoncée dans la jungle, faisant fi des sifflements des serpents, des feulements des fauves, des grognements de bêtes féroces, à la voracité sans limite, devenues humanivores. Elle est sortie de cette jungle pour gravir les collines, toutes les collines, d’où elle a pu apercevoir autre chose. Elle a gravi tous les sommets, et de l’un d’eux elle s’est retournée vers moi en me faisant signe de la rejoindre.  Et j’ai marché et je marche encore, encore et toujours pour rejoindre ces nouveaux sommets. Bien sûr, quand vous me voyez, je suis bien maladroit sur mes jambes qui refusent d’avancer, je ne sors plus guère, mais ce que peut être piégeuse cette apparence ! Ce qu’elle peut nous mener en bateau, avec sa myopie, cette apparence. Alor que tout se passe à l’intérieur. Dans mon for intérieur, je suis un incendie qui couve et qui n’a qu’une envie, délivrer ses flammes d’amour pour faire briller la joie, lui donner vie enfin. Je suis un volcan endormi, le magma qui grossit, qui grandit, qui enfle, qui veut percer la croûte pour offrir sa force de délivrance, sa force d’aimer, ne pas engloutir sous une lave incandescente ces populations, cette Humanité qui ne demande qu’à vivre, qu’à aimer, mais l’amener à saisir un peu de cette chaleur et la mettre dans leur cœur qui dès lors, battra autrement. Je suis un vieux tacot en apparence, mais en réalité brûle en moi un carburant si magnifiquement mis au point, qu’il me nourrit comme une formule 1, une formule unité et je roule et j’avance avec une certitude assurée sur ces nouveaux circuits, ces nouveaux sentiers, applaudi par l’Invisible qui me remercie chaque jour, chaque soir, de me voir toujours aussi décidé.

Michel Labeaume

Date de dernière mise à jour : 03/06/2025

Aucune note. Soyez le premier à attribuer une note !

Ajouter un commentaire

Anti-spam