Métamorphose

Métamorphose

Je le dis, je le répète, le récapitule que c’est dans le cœur du vivant que tout se ressent, que tout se doit, que tout se voit. Cela n’a jamais été dans une bourse pleine d’argent, dans de vains discours, dans les boniments, dans la mauvaise foi. C’est dans le cœur du vivant que la vie se déploie. Que cela soit un brin d’herbe, une musaraigne ou un séquoia. Que cela soit dans une larme de joie, une autre de peine, un cri de souffrance, des pas d’errance ou une brusque montée d’émoi. C’est dans le rire aussi, dans la joie, la joie simple en contemplant l’aurore et en remerciant l’Univers d’être vivant. Ce ne sera jamais dans les diktats, les braises de haine qui couvent avant de massacrer, de déverser sa haine, de tuer avec ses propres chaînes, et se retrouver survivant face à des milliers de cadavres en se disant : Pourquoi ? Ce ne sera jamais dans des chiffres d’affaires mirobolants alors que le peuple ouvrier trime sans jamais voir le bout du tunnel, sans jamais ressentir de quiétude, en obéissant aux puissants qui n’ont plus que la crise comme fondement. Les dragons couvrent l’azur de leurs ailes lourdes obscurcissant les existences, sans y parvenir totalement. Heureusement. Car je le dis, je le répète, c’est dans le vivant que tout se ressent, que tout se voit, que tout se doit. C’est dans les mains qui lâchent l’enfant pour le voir faire ses premiers pas, c’est dans les fleurs du potager qui s’ouvrent, ces fleurs semées un après-midi d’été. C’est dans la fuite du chevreuil dans la brume teintée d’aurore, dans la main ouverte qui reçoit l’oiseau pour prendre quelques graines, dans ce foisonnement de verdures, de plantes qui se déchaînent dans un bel élan en début de printemps. Ce ne sera jamais dans les colonnes des journaux, vasques putrides remplies de verbiage, de soporifique, d’incohérent. Nous sommes minuscules sur cette planète ecchymose, mais nous avons en nous un diamant. Et il est tellement bien caché sous des monceaux d’aveuglements, de refus, que bien souvent le doute s’installe. Nous n’osons y croire. Et pourtant ! Ce diamant est tout un monde qui, quand on réussit à l’ouvrir délicatement, surgit en un feu de lumières qui veulent nous voir plus grands. Dès lors, plus rien n’arrête le nouveau pèlerin. Il prend son bâton et en avant. Parfois, il s’arrête et se repose dans un coin de solitude. Solitude dont il n’a plus peur. D’ailleurs celui qui fuit la solitude se fuit lui-même. La solitude est un chant. Un chant de mystères.

Bien sûr, il faut bien la choisir, tant le lieu que le moment. C’est évident. Le pèlerin continue son voyage, inlassablement. Car il sait que la vie est Mouvement. La Vie autrement. Qu’y-a-t-il dans un arsenal d’armements ? Rien d’autre que du stupide, du lourd, de l’écrasant. Du figé dans la boue. La Vie est autrement. Elle est celle des champs labourés, où le blé va lever et murir non pour se faire de l’argent, mais pour nourrir. C’est cela l’important. Celle des chants entonnés autour d’un feu de camp pendant que la jeune maman donne le sein à l’enfant et l’ainé endormi près du feu vit des rêves qui le propulsent à la vitesse de la pensée dans des Mondes où la faconde du verbe Aimer se ressent à chaque seconde. Dans ce rêve il n’y a pas de devoir de mémoire, pas question de ressasser ce Monde terrestre où l’immonde est un volcan sans cesse en éruption. Mais qui n’empêche pas le battement du cœur du Vivant, là où tout se ressent, tout se doit, tout se voit, tout est grand.  Prends ton bâton. Il est temps.

Michel Labeaume

3 février 24

Date de dernière mise à jour : 03/02/2024

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