Le zoo

Le zoo

L’automne est enfin là. Couleurs des feuillages, brume, fraîcheur, tout un panel de beauté faisant presque oublier les vacances, et la crise sanitaire. Soudain, un lièvre-argent déboule d’un fourré, fuyant à toute vitesse un renard-politique, bavant d’envie, étant au maximum de ses possibilités physiques. Il faut dire que le renard-politique est un bel animal. Prenant soin de son apparence, entouré d’esthéticiennes, il se targue d’être rusé, sans toutefois l’afficher, sa prestance résumant tout. Sa nourriture préférée est le lièvre-argent, dont il raffole, et lui procure satiété, richesse et pouvoir. Mais le lièvre-argent est malin aussi, rapide, et moqueur. Elevé dans les enclos-banquiers de Wall-Street, et autres Bourses, il a été également l’objet d’attentions et de soins pour en faire un alléchant appât. La course folle de nos deux compères est régulièrement commentée dans la presse par les pintades-média, faisant preuve régulièrement d’élogieuses colonnes dans les journaux. Parfois, au bord de la piste, admirant les deux athlètes avec autant d’ironie narquoise que de jouissance grotesque, un cochon-milliardaire, havane à 450 dollars au coin du groin, pousse des grouik de satisfaction en se frottant la panse tendue au maximum. Même si des dindons lanceurs d’alertes gloussent à qui mieux mieux, ils sont aussitôt raillés et éreintés par les pintades-média, ayant l’outrecuidance d’un incroyable culot. Pendant que cette stupide compétition se déroule, surveillée de près par des poulets, derrière les grilles du grand stade, les mulots, les rats, les cloportes se terrent dans leurs abris, espérant sans trop y croire vraiment, la fin de ce cauchemar. Sur un petit monticule de terre, une fourmi rouge assiste à la scène et d’une voix grommelée dit : Lénine, reviens, ils sont devenus fous. Puis s’enfonce dans l’ouverture de sa fourmilière.

Le soir, après la brune, la nuit ayant lentement déployé son linceul, les cris nocturnes des hyènes-tradeurs, des lions-boursiers, retentissent férocement, en se lançant à la poursuite de lièvres-argent blessés ou malades et autres proies précieuses et nécessaires à la puissance de maîtres de la jungle.

Michel Labeaume

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