Bouquets d’instants
Le bonheur. Qu’est-il vraiment ce bonheur ? Ça peut-être tout simplement, ça peut commencer par quelques personnes debout, immobiles, face à un champ de fleurs. Elles peuvent même être des centaines, toutes alignées. Et pourquoi pas des milliers, toutes immobiles face à cet immense champ de fleurs et ressentant déjà les premières fragrances venues les titiller. Puis, se regardant juste une seconde pour se dire : Osons ! Et les regards à nouveau vers le grand champ de fleurs, cet océan de couleurs et voilà qu’ensemble elles commencent à marcher, pénétrant dans le champ, se laissant envahir par ces frissons de vérité, ce foisonnement de petites piqures de joie qui pénètre leur être, qui pénètre leur âme dans un tourbillon de bonheur. Elles laissent les bras le long du corps, mains ouvertes, pour caresser les tiges, pour caresser les corolles, les couleurs, pour vivre pleinement cet instantané. Et d’en cueillir quelques-unes juste pour un petit bouquet qu’elles brandissent vers le ciel, attendant le souffle créateur qui va les faire danser, dans un tourbillon de couleurs, dans un jeu de bonheur instantané. Ce n’est rien d’autre le bonheur. Rien d’autre que ces petites initiatives décidées dans l’instantané, s’arrêter le long de la rivière du Temps, pleine de lumières, et créer ce remerciement, remerciement de simplement pouvoir vivre, enfin vivre en s’aimant et en aimant ses compagnons de voyage, dont certains se sont aussi arrêtés pour participer à cet instantané, cet instant créateur, cette danse de gens ayant découvert que le vrai bonheur se découvre et se crée d’abord dans la simplicité, et qu’il ne doit pour exister qu’être partagé, jamais possédé. Qu’il ne doit pas être enseigné dans les écoles, dans les facultés, comme une simple matière à noter. Quelle erreur ce serait. Si malheureusement tel était le cas, allez consulter le devoir du cancre ave un gros zéro rouge, et sous lequel il a écrit avant de s’enfuir de cette salle sentant le renfermé : Vous ne comprenez rien au bonheur ! Il n’est pas à étudier, il est à vivre, il est à créer, à faire surgir de nos tripes, extirpé pour auréoler cet instant choisi, juste pour dire, pour murmurer ou même pour chanter, chanter à tue-tête pourquoi pas si ça peut réveiller les endormis, chanter ce verbe être, ce verbe aimer, ce verbe partager, trois fleurs cueillies dans un immense champ de fleurs, océan de couleurs, de corolles ayant le bonheur de juste exister pour qu’on vienne se délecter de leur parfum, et se fanant heureuses de retrouver l’Eden où l’on a de cesse de les cultiver. Le bonheur est un petit instant choisi sciemment par un anonyme pour à la fois remercier et offrir la joie de vivre. Ce n’est vraiment pas compliqué. Et c’est surtout à multiplier, au gré de vos envies, de vos idées sans vous sentir obligés d’en parler à la radio, d’aller en débattre sur les plateaux télé. Le bonheur n’est pas un dossier ouvert par des blablateurs stupides, mais un instant choisi par des intrépides ayant décidé de le créer, de le faire vivre dans son instantané et remercier enfin l’Univers et son sommet encore plus haut, encore plus loin, de nous avoir offert cette possibilité de simplement vivre, et d’être enfin heureux. Ce n’est que ça le verbe aimer, une toute petite graine qui ne demande qu’à germer mais ce qu’elle a à vous offrir, vous ne pouvez l’imaginer.
Michel Labeaume