Levains

 

 

 

 

Levains
 
 
 
Il y va quand même au boulot,
Il traîne un peu,
Mais c’est son gagne-pain.
Le travail pour l’ouvrier,
C’est un chemin rempli de miettes.
 
Quand sa boîte va fermer,
Pour ouvrir en Asie,
Il descend dans la rue,
Même s’il sait au fond de lui
Que c’est peine perdue,
Il veut lutter
Pour continuer à gagner sa croûte.
 
Dans la demeure du patron,
A l’écart de la ville,
On fête les fiançailles
De la fille avec un Monsieur de…
On a mis les petits plats dans les grands,
On a lustré l’argenterie,
On a tâté la consistance
Du pain de chez Poilâne.
 
L’ouvrier rentre chez lui,
Il a évité les matraques
Des policiers.
Il a évité de prendre des coups.
Ce soir, se dit-il,
Il faudra bénir le pain rassis.
 
 
 
 
Puis le jour fatidique est arrivé :
Ils doivent déménager.
Il ne restait qu’un an de traites
Pour payer la maison,
Quelques miettes en comparaison
De ce qu’ils ont donné
Pendant tant d’années.
Mais comment vivre sous un toit de chômage
Quand il vous arrive toutes ces tuiles ?
 
Ils ont fini dans un F2
Un petit HLM en banlieue,
Là où les gens ont du mal
A se dire bonjour,
Le visage fermé par l’angoisse
Du lendemain.
Ils se croisent sans mot dire,
Une baguette sous le bras.
Ils se croisent en maudissant
Ceux qui les ont mis dans
Ce pétrin.
 
Pendant ce temps,
Les scandales financiers
Déversent leur torrentielle
Imbécillité.
Le liquide devient purin
Pour ceux qui ne calculent pas
Le prix du pain.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Pendant ce temps,
Monsieur et Madame
Parlent posément
Au salon.
Lui, parle de ses actions.
Elle pense au mariage de sa fille.
Il faudra mettre les petits plats dans les grands.
Il faudra lustrer l’argenterie.
Il ne faudra pas regarder à la dépense
Pour une telle fête.
Il faudra se dépenser sans compter
Et bien choisir ses invités.
Sur les cartons d’invitations
Ils auront fait attention
De ne pas mettre toute une tartine,
Juste leur nom en lettres d’or
Et celui de la promise et du promis,
En lettres d’amour.
 
 
 
La vie est ainsi,
Elle donne son quotidien de non-sens
Mais c’est la vie que voulez-vous
Même si ça n’as pas de sens
Pour ceux qui triment
Même si ça n’as de sens
Pour ceux qui font trimer
Que de pouvoir continuer
A se vautrer dans l’opulence.
 
Michel Labeaume
 

Date de dernière mise à jour : 02/07/2021

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