Alzhei… En franchissant le seuilDe son passé composéIl a caché dans ses tripesDans ses tripes comme un bouletQuelques instants de bonheursPassés,Cueillis à la hâteDans la jachère de ses souvenirsEncadré par deux sourires.En franchissant le seuilDe sa mémoireFissurée,Il a sentiContre sa jambeLa caresse du vieux chatQui flairait ce quelque choseQui n’allait pas.Le vieux a senti aussiUn regard posé sur luiCelui d’un voisinDe l’autre côté de la rue,De l’autre côté de la vie,Le regard vide d’un voisinRempli de compassion.Sur la fenêtreTremblait un géranium.Une pluie fine et un soleil blancEcrivaient la journéeEmmenant tout celaSurtout le vieuxTremblant un peuAvec dans ses tripesCe boulet !Ce nœud !Emmenant tout celaSurtout le vieuxVers un singulier soirUn crépusculaire espoirAux racines brûlées. La grande maisonA la pelouse bien coupéeEtait pleine de fleursEt de sourires composés.Parfois quelques crisQuelques lamentationsDéchiraient la quiétudeUn peu artificielleC’était de languissantes plaintesEvacuées d’un tréfonds. Dans le boulet du petit vieuxIl y avait des aurores humidesA l’orange d’une journée à venirEnvoilant la prairieEt les fleurs humides de rosée. Dans le boulet du petit vieuxIl y avait des étables rempliesDe plaintes bovinesRéclamant la grande terreEt ses vertus divines. Dans le boulet du petit vieuxIl y avait une petite vieilleTombée il y a une éternitéDans le fond du poulaillerLes grains éparpillés. Dans le boulet du petit vieuxIl y avait le cadre au vieux boisDu fiston parti ma foisS’enfouir dans les tranchéesDe la déraison. Et là, dans la grande maison,A la pelouse bien coupée,Le petit vieux est assisSur une chaise dans le couloirSes mains tripotant sa crainteEt ses lambeaux de mémoireImpossible de les calmerEt même de retenirLes quelques larmesCoulant sur son gilet. Michel Labeaume